vendredi 31 décembre 2010

Séminaire: "Le désir numérique: nouveaux fragments du discours amoureux"

La prochaine séance du séminaire MICA "Penser l'immatériel: interroger les concepts" aura lieu le 18 janvier 2011, de 14h00 à 16h45 à la MSHA (salle Jean Bordes).

Conférencier invité: Christian LICOPPE, directeur du Département de Sciences économiques et sociales à Télécom Paris Tech.

Nous commençons par un clin d’œil à Roland Barthes, à ses fragments d’un discours amoureux dont nous voulons démontrer qu’ils trouvent aujourd’hui, dans l’univers numérique, des formes nouvelles de style, de stratégies et de « figures » communicationnelles. Pour Barthes, le fragment, tel qu’il le pratique dans cette œuvre, est d’abord un procédé de l’écriture littéraire. Ses notices forment un lexique qui emprunte à d’autres œuvres, littéraires ou encore picturales, mais aussi à sa propre expérience amoureuse. Par extension, nous ferons du fragment le format en usage dans les pratiques numériques de la communication interpersonnelle, celle qui vise et qui veille à créer, puis à entretenir et parfois à rompre des affinités diverses. Le courriel, le SMS, les réseaux sociaux, les sites de rencontre mais aussi bien les sites de recherche de colocataires sont donc aujourd’hui les outils qui tout à la fois diffusent et produisent des fragments de parole dans le but très précis de nouer des liens de confidence et de confiance (le sens anglais de confidence nous aide d’ailleurs à faire ce rapprochement). Pour autant, le message court transmet peu d’indices sur l’engagement réel du locuteur ; le courriel en liste de diffusion dilue le devoir de répondre dans l’instant (les autres le feront peut-être) ; le chat permet, à tout moment, de reprendre le fil d’un babil dont le but, on le sait bien, est de simplement ajuster les émotions (la connivence des affects, comme dit Marcel Gauchet).

Dans ce séminaire, nous reviendrons sur les logiques singulières de cette communication communément appelée « virtuelle », voire « immatérielle », en raison sans doute de la fragilité des supports et de la fugacité des messages : que dure un SMS ? Ou assurément en raison du peu que révèlent d’eux-mêmes les interlocuteurs en quasi-présence, lesquels semblent hésiter entre quête narcissique et simulacre de reconnaissance. Faut-il voir dans ces nouveaux « fragments du discours amoureux » les signes de ce que Castel appelle la « nouvelle culture psychologique », marquée surtout par le repli de l’individu sur le territoire dépolitisé de l’intime ? De quoi, finalement, le SMS est-il le symptôme ? D’une perte de substance du social ? D’une nouvelle économie pragmatique du lien social ? A toutes ces questions et bien d’autres nos invités fourniront des réponses à la fois amples, précises et actuelles.

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