ARCHÉOLOGIE DES NOUVELLES TECHNOLOGIES
APPEL A TEXTES
Après avoir interrogé le numérique comme texture, dans son extension pratique (n°1), puis la virtualité en relation au contexte de la quotidienneté (n°2), la revue en ligne Réel-Virtuel propose de repenser les « nouvelles technologies » à travers le concept d’« archéologie ». En complément des recherches mettant à jour leur spécificité innovante, ce troisième numéro éprouvera l’hypothèse d’un enracinement de ces dispositifs récents, au-delà des limites de l’ère contemporaine. Cette question est ouverte à des réflexions pluridisciplinaires et sera particulièrement éclairée par des références à des démarches artistiques, à la fois contemporaines et inactuelles, rendant visibles des liens avec d’autres temps.
« Archéologie » est issue du grec arkhê, qui désigne l'origine : à la fois le point de commencement, l'extrémité ; le principe, qui contient en soi son déploiement à venir ; et le commandement, le pouvoir souverain, qui énonce des lois, qui fait autorité. Le discours archéologique remet ainsi en perspective son objet, interrogeant son rapport au temps, son essentialité, et ce qui détermine son agencement. Comment peut-on penser une archéologie des nouvelles technologies qui, par leur dénomination même, sont définies dans un présent en rupture avec le passé, et qui se divulguent comme simple praxis ?
Or, au sein d’un certain nombre de démarches artistiques, il apparaît que des récits, théories et observations sur l’origine de l’homme sont réinvestis par l’usage des nouvelles technologies. Comment comprendre par exemple l’œuvre de Bill Viola où des scènes bibliques sont revisitées à travers le ralenti vidéographique, celle de Daniel Lee qui refigure l’évolution de l’animal à l’humain par l’hybridation de photographies, ou encore les Coutures cellulaires de Nicole Tran Ba Vang qui évoquent les manipulations qu’elle opère sur la trame des pixels ? Selon Agamben, le contemporain, dont la posture de l’artiste est exemplaire, se définit par un regard déphasé, inactuel, qui décèle dans le présent les signes d’archaïsmes prenant le sens d’origine en devenir. Alors, plutôt que détournements, ces références à des époques antérieures seraient-elles révélatrices de ce qui est essentiellement à l’œuvre, de manière plus subtile voire invisible, dans les nouvelles technologies ? Jusqu’où pourrons-nous étendre l’approche de Couchot, qui retraça l’histoire de la technologie dans l’art, reliant la réalité virtuelle à la perspective albertienne ?
Malgré une apparente rupture avec le passé, les nouvelles technologies pourraient-elles ainsi se repenser dans une relative régularité ? Suivant une archéologie foucaldienne, pourrons-nous en découvrir de profondes strates discursives ? Comment questionner leur émergence, leur positivité, leur puissance de répétition et leurs processus d’altération ? L’enjeu sera de redéfinir les nouvelles technologies en mettant à jour le cadre élargi dans lequel elles s’inscrivent : sans en occulter les spécificités, les recherches tenteront d’identifier des ancrages et d’en préciser les modalités. Par exemple, en partant de l’Optical timeline de Tony Oursler, jusqu’à quelles prémices pourrait remonter leur histoire ? L’étude des prototypages de Michael Rees, inspirés du mudra hindou comme des putti de la Renaissance, permettrait-elle de déceler des tendances intemporelles qui les traversent, voire les impulsent ? Seraient-elles également le déploiement d’une essence humaine, comme le suggèrent les « portraits » de synthèse de Catherine Ikam qui donnent un nouveau visage aux thèmes du rapport à l’autre et de l’identité ? Les nouvelles technologies s’inscrivent-elles alors dans un temps continu ou discontinu, dynamique ou statique, linéaire, cyclique, ou spiralé, voire chiffonné (Serres) ? Peut-on leur appliquer, comme aux images, une épistémologie anachronique (Didi-Huberman) ? Se révèleront-elles actualisation (Deleuze), survivance (Warburg), trace (Derrida), ruine (Benjamin), résonnance (Bachelard) ou symptôme (Freud) ?
Vous êtes invités à transmettre vos PROPOSITIONS jusqu’au 1er juin 2011
à revuereelvirtuel@gmx.fr : dans un fichier word (.doc), un argumentaire d’environ 4000 signes, et une courte présentation de l’auteur (statut, établissement, discipline, domaines de compétence, sélection de publications, etc.).